Silué Nahoua, un des plus grands maîtres du balafon de la région du Poro, est une figure emblématique de Nafoun, un village situé à moins de 10 kilomètres de Sirasso. Aujourd’hui, retiré de la scène, l’ancien chef d’orchestre de balafon se souvient de son enfance marquée par le balafon, les bénédictions paternelles et le souvenir poignant de sa mère Péfoungodjomon, atteinte de maladie mentale.
Silué Nahoua est né dans une famille non autochtone de Nafoun. Son père, Silué Niboténin, dont le prénom signifie que le géniteur n’était pas originaire du village. Ce dernier avait finalement acquis un statut respecté au sein de la communauté. « Mon père n’était pas de Nafoun, mais il est devenu un pilier du village grâce à ses nombreux services rendus, notamment ses connaissances en médecine traditionnelle », confie Silué.
A lire aussi : Mali : A la découverte du Centre Culturel Sénoufo de Sikasso
L’histoire de son père est fascinante. Respecté par tous, Silué Niboténin guérissait les malades sans jamais demander de compensation financière, un geste de générosité qui a marqué sa génération et les premiers responsables de ce village. Sa renommée a tellement grandi que le chef du village, Tchérégnimin, et le chef de canton, Fononzouwon, ont décidé de lui rendre hommage en l’inhumant au cœur du village, un honneur généralement réservé aux chefs de canton. Ses funérailles ont été célébrées avec les mêmes égards qu’un chef, un signe de la reconnaissance des villageois pour ses contributions.
Cependant, c’est l’enfance de Silué Nahoua qui est empreinte de souvenirs douloureux. Alors qu’il apprenait à jouer au balafon, sa mère, Péfoungodjomon, fut frappée par une maladie mentale. Ce tragique épisode n’a fait que renforcer son lien avec son père et son apprentissage au balafon. « C’est pendant mon apprentissage du balafon que ma mère est tombée malade », se rappelle-t-il avec émotion.
Dans son récit, Silué Nahoua évoque également les bénédictions qu’il a reçues tout au long de sa vie, notamment en prenant soin de la seconde épouse de son père, une responsabilité qu’il considérait comme un devoir sacré. « J’ai mis la seconde femme de mon père au-dessus de ma propre mère. C’était une façon d’obtenir des bénédictions. Mon père s’interrogeait souvent sur cette attention particulière que je portais à sa seconde épouse, se demandant si quelqu’un m’avait conseillé ainsi », raconte-t-il. Outre ses talents de chef d’orchestre de balafon, Silué Nahoua était également un chasseur aguerri. « Mon père a mangé la viande de brousse que je chassais jusqu’à sa mort », se remémore-t-il fièrement.
Cliquez ici pour vous abonner à Ivoir’Hebdo, meilleur journal d’investigation de Côte d’Ivoire et première meilleure vente
Aujourd’hui, l’héritage de Silué Nahoua se perpétue à travers son fils, Silué Vié, qui continue de faire vibrer les rythmes du balafon, préservant ainsi cette tradition familiale et culturelle. Silué Nahoua est satisfait de savoir que la relève est assurée, et que son nom continuera de résonner à travers les générations, aussi bien pour ses talents que pour les valeurs qu’il incarne.
Karina Fofana