Figure emblématique du groupe mythique Les Pétoulés, Thoras brise le silence et lance un appel émouvant à la réunification. Entre souvenirs, blessures et espoir, il retrace le parcours du trio qui a marqué le Youssoumba, et exprime son désir de voir renaître cette aventure musicale qui a fait vibrer toute une génération.
À l’état civil, il s’appelle Bahi Toussaint Jean-Paul Armand, mais sur scène, c’est Thoras Pétoulés. Fier de ses origines guéré, souvent confondu à tort avec les Bété, Thoras revient sur la naissance du groupe Les Pétoulés, leur ascension fulgurante, les blessures du passé, et surtout son désir ardent de raviver la flamme.
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« Quand j’étais petit, j’écoutais les voix à la radio et je me demandais comment c’était possible d’entendre quelqu’un qu’on ne voit pas. Je me suis dit : moi aussi, un jour, je chanterai à la radio. »
C’est avec cette vision que Thoras rejoint un petit groupe de quartier, avant d’être mis en contact avec un certain Atemso, un chanteur impulsif mais passionné, qui allait devenir son compagnon de route. Plus tard, avec Palelo, le trio est formé : Les Pétoulés prennent vie. Leur musique, enracinée dans le Youssoumba, séduit rapidement les mélomanes. Le défunt Marcellin Yacé, célèbre arrangeur ivoirien, les prend sous son aile et les accompagne en studio. L’histoire commence alors.
Mais aujourd’hui, le groupe est silencieux. Dissensions, incompréhensions et mésententes ont éclipsé leur lumière. Pour Thoras, la nostalgie est forte, mais l’espoir demeure :
« Je fais toujours partie du groupe Les Pétoulés. Ce que je souhaite aujourd’hui, c’est la réunification. Je veux qu’on revienne ensemble, qu’on refasse vivre cette couleur musicale que les Ivoiriens ont tant aimée. »
Il interpelle directement son ancien compagnon Atemso :
« Tu sais comment on a débuté, tu sais quelle souffrance on a connue. Si Dieu t’a fait grâce aujourd’hui, il est temps de réunir tes frères. Pétoulés, c’est une famille. »
L’artiste souligne également les défis structurels qui ont freiné leur carrière. Le manque de producteurs désintéressés, la mainmise des DJ qui favorisent leurs propres créations au détriment des autres artistes, et l’évolution de la scène musicale vers le coupé-décalé, ont rendu l’ascension difficile :
« Les DJ, ce sont eux qui propulsent les sons. Mais beaucoup ont choisi de bloquer notre musique pour ne jouer que la leur. Cela a contribué à nous éteindre. »
Et le Youssoumba dans tout ça ? Thoras y croit encore. Inspiré par Boningo, son idole de toujours, qu’il rêve encore de rencontrer, il refuse d’abandonner ce style qui fait vibrer les côtiers et bien au-delà :
« Je ne suis pas de la côtière, mais j’ai adopté la musique de la côtière. Boningo et Aboutou Roots sont restés pour relever le niveau. Moi aussi, je suis là. »
Aujourd’hui, plus qu’un simple appel, les mots de Thoras résonnent comme une supplique d’artiste fidèle à ses racines et à son histoire. Dans un paysage musical en constante mutation, il croit encore à la force du Youssoumba et à la magie des retrouvailles. Si la musique adoucit les mœurs, peut-être saura-t-elle aussi guérir les blessures. Les fans, eux, n’attendent qu’une chose : revoir Les Pétoulés réunis, un micro à la main, et la passion au cœur.
Prince Beganssou
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