En affirmant sur le plateau de Sky Sports que la Coupe d’Afrique des Nations ne constituait pas un tournoi majeur, Jamie Carragher a suscité l’indignation à travers tout un continent.
Même la Confédération africaine de football (CAF) s’en est mêlée. Depuis dimanche 23 février et les déclarations sur Sky Sports de Jamie Carragher minimisant, au bout d’un argumentaire sur les chances de Mohamed Salah de remporter le Ballon d’Or, l’importance de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN), tout un continent s’est levé pour répondre à l’ex-défenseur de Liverpool (1996-2013). Le compte X de l’association continentale a multiplié les posts ces jours-ci en écho aux propos du consultant britannique. Un comportement étonnant de la CAF, sachant combien il est rare de la voir réagir de cette façon. La tirade de l’Anglais, que la chaîne a d’ailleurs rapidement supprimée de ses replays, arguant que l’Euro ou, à un degré moindre, la Copa América restent des compétitions internationales de plus haut standing que leur sœur africaine, valide un point de vue purement européocentré.
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Alors qu’elle se dispute souvent au milieu de la saison, la CAN est souvent décriée en Europe et il n’est pas rare que des internationaux africains soient interrogés sur le réel intérêt d’y participer. En janvier 2021, le néo international ivoirien Sébastien Haller avait d’ailleurs rétorqué à un journaliste : « Cela montre le manque de respect pour l’Afrique. Aurait-on posé cette question à un joueur européen avant l’Euro ? Bien sûr que je vais à la CAN ». Les commentaires de joueurs ou ex-joueurs africains ont plu dans la foulée et tout le continent a fait front. L’Égyptien Ahmed Elmohamady (ex-Aston Villa) a fustigé Carragher sur X : « Il ne sait pas ce que sont les tournois majeurs parce qu’il n’en a jamais gagné. La CAN est un tournoi majeur. Je suis fier de l’avoir remportée deux fois ». La légende des Pharaons Ahmed Hassan (4 fois vainqueur du tournoi) a condamné les propos, parlant même de racisme de la part de l’Anglais.
Dans un message rassembleur, le capitaine nigérian William Troost-Ekong a lui aussi réagi pour Talk Sport : « Le continent africain, comme les autres dans le monde, a apporté autant au jeu de football que nous aimons tous. Ne perdons donc pas de temps à comparer, mais célébrons l’un des joyaux de la couronne du jeu qui nous rassemble tous ». En donnant son point de vue de la sorte, le défenseur a quelque part invité Carragher à prendre du recul sur un football qu’il maîtrise moins bien.
BARTON, UN SOUTIEN PEU RECOMMANDABLE
Plus piquant, El-Hadji Diouf y est allé de son long message sur Instagram. Le Sénégalais, chiffres d’audiences à l’appui, a ensuite rappelé le nom de légendes continentales avant de s’en prendre plus personnellement à son ex-coéquipier à Liverpool : « Tu ne peux pas t’asseoir à la même table que ces noms africains. Toi le raciste, tu es qui pour t’en prendre à notre CAN ? Elle est la fierté de l’Afrique ! » « Aujourd’hui, en Afrique, si tu prononces le nom de Jamie Carragher, les gens croiront que tu parles d’une marque de ketchup ou de moutarde. C’est donc normal que tu manques de respect au plus grand tournoi d’Afrique et à tous ces grands footballeurs africains qui ont apporté leur contribution au football mondial et à tout le continent. Tu as besoin de ça pour exister et te faire connaître. Quand on n’a rien à dire, on la ferme », a poursuivi le Ballon d’Or africain 2001 et 2002. Pour ne pas l’aider face à cette déferlante, Carragher a été soutenu par Joey Barton. Pas vraiment une voix recommandable, puisque les interventions de l’ancien Marseillais flirtent souvent avec le complotisme, le racisme, la misogynie ou encore l’homophobie.
LES 22 VOTANTS AFRICAINS POURRAIENT SE RANGER DERRIÈRE SALAH
Enfin, en estimant que les chances de Mohamed Salah de décrocher le Ballon d’Or étaient plus faibles en raison de sa nationalité, Carragher s’est fourvoyé. Car un autre point convient d’être expliqué : les critères du vote. Un journaliste par pays au sein des 100 premières nations au classement Fifa dresse son top 10. Or, si l’Europe compte 42 participants, les voix attribuées sont souvent dispersées entre les favoris. En Afrique, sans faire dans le continentalisme, les 22 votants ont un poids considérable et pourraient bien se ranger à l’unanimité derrière le joueur de Liverpool. Dans ce contingent, il s’agit de ne pas oublier la perception des nations asiatiques du monde arabo-perse (Iran, Qatar, Irak, Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Jordanie, Oman, Bahreïn, Syrie), qui sont dans leur majorité des fans absolus de la Premier League et des prestations de Salah, joueur étendard qu’ils suivent depuis de nombreuses années.
Générations Nouvelles
NDLR : Le titre et l’introduction sont de la rédaction
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