Décédé dans la nuit du mercredi 19 au jeudi 20 janvier 1989, cela fait 35 ans que l’animateur-télé le plus talentueux de sa génération, véritable vedette de la télévision ivoirienne dans les années 80, Roger Fulgence Kassy (RFK) s’est éteint dans la fleur de l’âge à 33 ans suite à une longue maladie au moment où les Ivoiriens avaient encore besoin de lui. Cette brusque disparition a plongé la jeunesse ivoirienne et les acteurs du show-biz ivoirien et africain dans une consternation sans précédent.
Jeudi 20 janvier 1989-samedi 20 janvier 2024, il y a 35 ans que l’animateur vedette de la Radiodiffusion télévision ivoirienne (RTI), Roger Fulgence Kassy (RFK) déposait définitivement le micro. Originaire de Kokumbo, son village natal dans le département de Toumodi, où il repose désormais, Edmond Roger Fulgence Kassy dit (RFK) comme son public aimait l’appeler aurait eu 68 ans cette année 2024 s’il était encore en vie. Il a été révélé comme une star et un mentor de la jeunesse ivoirienne dans le milieu de la musique et du show business à la fin des années 1970. Au studio-école de la RTI où il a suivi sa formation en audiovisuel à sa sortie du lycée, il a suscité l’admiration de par sa coiffure style Afro, ses cols relevés, son ensemble blue-jean mais surtout par son talent à l’écran, qui font très vite de lui une référence pour la jeunesse ivoirienne.
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Ce rare talent, compose avec bien d’autres atouts. Ceux de concepteur et de producteur d’émissions, qui donneront vite naissance aux ténors de la musique ivoirienne. Entre autres, ‘’Super Star Station’’, ‘’Nandjelet’’, ‘’Jamboree’’, ‘’Première chance’’ et ‘’Tremplin’’ qui devient ‘’Podium’’ en 1977 (concours d’orchestre) sont les réalisations du natif de Kokumbo. « Tant qu’il y aura des hommes et des femmes sensibles à la chose musicale et capables d’apprécier un bon chanteur et une belle orchestration musicale, Podium vivra, vivra, vivra… », aimait-il dire à chaque début de son émission variété « Podium ». Il lâcha d’ailleurs cette phrase prophétique au cours de son dernier « Podium » une année avant de s’éteindre.
Le Studio 302
Ce concours qui avait pour but de donner la chance aux artistes en herbe a permis en son temps à Seydou Koné dit Alpha Blondy, Monique Séka, Ismaël Isaac, Nayanka Bell, Bailly Spinto, Aïcha Koné etc d’avoir des producteurs. »Demain tout allait changer » disait RFK aux artistes de « Première chance ». Il a également permis à des anciennes gloires de la musique de renaitre de leur cendre. Particulièrement, Paul Wassaba, Djimi Hyacinthe et autres ont bénéficié de la maestria de Roger Fulgence Kassy dit ‘’Ful’’ pour les fans ou les intimes pour reconquérir le public. En outre, grâce à son savoir-faire, il a contribué à promouvoir de nombreux jeunes animateurs ivoiriens à l’instar d’Yves Zogbo Junior, Georges Aboké et autres d’être des experts du micro.
Caractérisé par sa simplicité, il avait une façon particulière d’animer, de toucher et d’accrocher son auditoire. Les anciens compagnons qui l’on pratiqué ne manquent pas d’éloges à l’endroit de ce « nandjelet » qui aura laissé son empreinte sur l’espace audiovisuel. A en croire l’ex-chef de département Bandama Koffi Raymond dit Debach, le « Studio 302 », l’équipe de travail à laquelle Fulgence Kassy appartenait est née du fait que le numéro ‘’302’’ se trouvait sur un des bureaux de la Radiodiffusion télévision ivoirienne. Cela a inspiré Traoré Amadou Sékou dit « TAS » (mort en 2001), Soumahoro Mamadou dit Kanaté (mort en 1999), Bandama Debach (réalisateurs), Fulgence Kassy et Georges Taï Benson qui a rejoint l’équipe par la suite.
Le 20 janvier 1989 Roger Fulgence Kassy s’éteindra des suites d’une cirrhose de foie. La RTI venait ainsi de perdre son icône. Ce mal silencieux qui l’a rongé pendant un moment, il tenait bon avec comme seule arme, »son micro ». Ses obsèques, suivies par plusieurs milliers de jeunes ivoiriens, suscitaient un engouement national. La levée de corps s’est faite à Abidjan sous une pluie forte dans une douleur affligeante. Les quartiers s’étaient tus, les villes furent mortes, les regards étaient livide, les larmes étaient nourries.
RFK emporté avec des dizaines de jeunes gens
Comme si cela ne suffisait pas, le même jour, sur l’autoroute de Yopougon, le bus 36 va faire un terrible accident. Emportant avec RFK, des dizaines de jeunes gens et filles. En dépit de ce drame ses fans n’ont pas hésité à accompagner leur idole jusqu’à sa dernière demeure à Kokumbo. À l’instar du musicien Serge Kassi qui chantait « Fulgence Kassy, tu es parti trop vite », beaucoup ont rendu un hommage à cet homme qui a grandement marqué l’univers audiovisuel ivoirien dont Alpha Blondy avec la chanson « Fulgence Kassy ».
Depuis sa disparition, il faut l’avouer seul Podium, un concours d’orchestres qu’il avait initié avait résisté avec un parcours en dents de scie. Aujourd’hui, ce concours du show-biz ivoirien n’existe plus. Passage obligé en son temps pour prétendre au titre d’artiste en Côte d’Ivoire, ce label de la télévision ivoirienne n’existe que de mémoire. Les pèlerinages promis par ses nombreux fans n’ont duré qu’une année. Les concerts promis chaque année pour célébrer l’anniversaire de sa mort n’ont duré que trois ans. Seule la place, appelée « Espace RFK» dans la cours de la Maison de la télévision qui consacre cette « bête de scène » qui a marqué la jeunesse ivoirienne a pu résister au temps.
Full immortalisé 26 ans après sa mort
Ce n’est que le vendredi 26 juin 2015 soit 26 ans après sa disparition que la nation va le reconnaître, en vue de l’immortaliser. En effet, ‘’Full’’ a été élevé dans l’Ordre du mérite ivoirien à titre posthume par la Grande Chancelière, Henriette Dagri Diabaté. Roger Fulgence kassy s’en est donc allé comme une étoile filante à 33 ans dans la fleur de l’âge laissant derrière lui Thierry Kassy, son fils unique. Celui-ci est décédé aux Etats-Unis le samedi 11 avril 2020 des suites du Coronavirus (Covid-19). Comme ses illustres devanciers ‘’Ful’’ reste ‘’immortel’’, parce qu’il ne s’est pas contenté de vivre, il a existé.
Karina Fofana